Fi Group

Flash Fiscal - Juin 2023

Retrouvez l’actualité fiscale du financement de l’innovation avec l’analyse de la jurisprudence du mois de juin 2023 par les experts F.initiatives.

Définition d'une subvention publique au sens du CIR

Conseil d’Etat 12 juillet 2023 n°463363, FCBA

La décision

Cette décision s’inscrit dans la suite de l’arrêt du conseil d’état du 20/02/2023.

La société avait reçu des aides en provenance du comité professionnel de développement des industries françaises de l’ameublement et du bois (CODIFAB) et de l’interprofession nationale France bois forêt (FBF), sur la base de conventions, au titre de ses projets de recherche. Elle faisait valoir que les aides reçues de ces deux organismes n’étaient pas des subventions publiques, et de ce fait, ne devaient pas être déduites de l’assiette de son CIR. L’administration, le tribunal et la cour d’appel contestaient cette position, et traitaient ces financements comme des subventions, c’est-à-dire qu’ils devaient être déduits de l’assiette des dépenses éligibles au CIR.

L'analyse F.initiatives

Le Conseil d’Etat, après avoir admis la recevabilité de la saisie, a cassé l’arrêt de la cour d’appel. Les hauts magistrats précisent : « Pour l’application du III de l’article 244 quater B du code général des impôts, on entend par ” subvention publique ” toute aide versée à raison d’opérations ouvrant droit au crédit d’impôt par une personne morale de droit public. »

La bonne pratique F.initiatives

En l’absence de définition légale ou doctrinale, cette décision apporte finalement une réponse claire sur la notion de subvention publique dans le cadre du CIR.

Ainsi, nous retiendrons de cette décision que les aides financières provenant des personnes morales de droit privé, et ce même si elles sont investies de mission de service publique, ne peuvent être assimilées à des subventions publiques à déduire dans le cadre du CIR.

Prêt à Taux Zéro et déclaration CIR

CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 10/01/2023, 21BX00401, Société Ledoux Finances

La décision

La cour d’appel confirme la décision de l’administration de déduire les montants de Prêt à Taux Zéro Innovation (PTZI) de l’assiette de dépenses du CIR.

L'analyse F.initiatives

Bien que le PTZI soit un prêt qui doive être remboursé, la cour considère la nature juridique de la BPI comme organisme contrôlé par l’Etat. Elle considère que ce prêt, quelles que soient les clauses tenant à son remboursement, son régime juridique et son traitement comptable, constituait une subvention publique indirecte devant être déduite de l’assiette du CIR.

L’Administration fiscale a actualisé sa doctrine sur le sujet le 13 juillet 2021 en précisant que : « Les prêts à taux zéro innovation (PTZI) distribués par Bpifrance, par leurs caractéristiques, sont assimilés à un financement public de projets de recherche.» (BOI-BIC-RICI-10-10-30-20 n°25)

La bonne pratique F.initiatives

Les PTZI doivent donc être traités de la même manière que les avances remboursables : déduites de l’assiette des dépenses lors de leur perception, puis réintégrées lors du remboursement.

F.initiatives préconise d’appliquer cette solution pour l’ensemble des prêts à taux réduits émanant d’un organisme public.

Réalité des projets de R&D et responsabilité du déclarant

CAA de MARSEILLE, 3ème chambre, 08/06/2023, 21MA00242, SARL TRSB Sud

La décision

La Cour d’Appel maintient la pénalité de 80% pour manœuvre frauduleuse à l’encontre de la société, car l’administration soutient que les déclarations de CIR ne sont liées à aucune activité de R&D. L’administration s’appuie sur l’absence de matérialité, et de la « documentation technique fictive s’appuyant sur du plagiat de travaux universitaires ».

L'analyse F.initiatives

Concernant l’élément intentionnel des manœuvres frauduleuses, la société indique que les travaux de recherche avaient été validés par des experts de la BPI. Elle indique ne pas avoir eu conscience que les travaux de recherche en cause n’étaient pas éligibles au CIR. Par ailleurs, la société met en avant son accompagnement par un conseil spécialisé en CIR. Ce dernier avait pour mission d’interviewer les intervenants techniques, de définir les informations nécessaires à la rédaction des dossiers justifiant des dépenses éligibles et d’assister les équipes dans la formalisation des informations.

Or, même en la présence d’un conseil, la société déclarante devait procéder à la relecture du dossier de la société en cause, qui de ce fait ne pouvait ignorer le caractère inexistant des recherches. Le dossier de demande était signé par la société SARL TRSB Sud et non par la société prestataire. Pour l’administration, la société a mis en œuvre un procédé dans le but d’obtenir indûment un crédit d’impôt recherche. Le fait que la société ait été accompagnée par un conseil spécialisé n’est pas de nature à dégager sa responsabilité.

La bonne pratique F.initiatives

En préambule, il est évident que toute déclaration CIR doit reposer sur des travaux de R&D réels et éligibles.

Si vous êtes accompagnés d’un conseil, assurez-vous que les audits et leurs comptes-rendus correspondent bien à la réalité de vos travaux, pour éviter toute incompréhension. La justification des déclarations CIR doit répondre aux exigences de l’administration en termes de matérialité et de traçabilité.

Enfin, relisez avec attention les livrables : détail de la valorisation, justification de l’éligibilité, fiches techniques justificatives.

Intégration fiscale et capacité à agir

CAA de TOULOUSE, 1ère chambre, 08/06/2023, 21TL20162, Les Ateliers de Graves

La décision

La société déclarante, intégrée fiscalement, a perçu le remboursement de sa créance CIR tardivement, et a demandé que le remboursement soit assorti d’intérêts moratoires. La cour d’appel rejette la requête de la société.

L'analyse F.initiatives

La société les Ateliers de Graves fait partie d’un groupe fiscalement intégré, dont la société ADG Group est la société mère intégrante. En septembre 2015, ADG Group a déposé des déclarations de CIR à raison des dépenses engagées par sa fille pour les années 2012 à 2014. Elle a également fait une demande de remboursement du CIR.

La société fille a été contrôlée sur le CIR. Lors de la clôture, Les Ateliers de Graves ont accepté les rectifications et ont demandé que le remboursement de la créance soit assorti d’intérêts moratoires. Si l’administration a bien restitué la créance CIR, elle n’a pas vers les intérêts car la société fille, intégrée fiscalement, n’avait pas capacité à agir sur ce sujet : dans un groupe fiscalement intégré, c’est la société mère qui est substituée aux sociétés du groupe pour les sujets fiscaux. Cela signifie également que seule cette société peut introduire une réclamation contentieuse en vue d’obtenir le remboursement d’une créance de CIR qui lui sera réattribuée.

Lorsque l’introduction de la réclamation est faite par une personne qui n’en a normalement pas la qualité, ou qui ne dispose pas de mandat pour le faire, cette irrégularité peut être réparée jusqu’à l’expiration du délai imparti au contribuable pour présenter cette demande. Au-delà ce de délai, l’irrégularité ne peut plus être réparée.

La demande étant donc irrégulière, la cour l’a rejetée.

La bonne pratique F.initiatives

Dans le cadre de procédures fiscales, notamment lorsqu’il y a une intégration fiscale, assurez-vous que les demandes soient introduites par une société ayant capacité à agir.

Distinction entre dépenses engagées par la société mère ou par la société fille

CAA de PARIS, 7ème chambre, 14/06/2023, 21PA03160, Maïa Capital

La décision

La cour d’appel rejette la requête de la société, et invalide sa déclaration CII, en considérant que c’est sa filiale qui a réellement engagé les dépenses.

L'analyse F.initiatives

La société Maïa Capital a obtenu des restitutions de crédit d’impôt innovation à raison des dépenses de personnel et des dépenses de fonctionnement qu’elle dit avoir engagées au cours des exercices clos en 2013, 2014 et 2015. Les dépenses en cause étaient engagées pour la conception d’un nouveau CRM à destination d’elle-même et des TPE de courtage en produits financiers. Parallèlement, elle a conclu une convention d’assistance administrative, juridique et fiscale et de direction au profit de sa fille. L’administration fiscale a considéré que les dépenses de personnel n’étaient pas éligibles au prétexte que la société Maïa Capital n’est pas à l’initiative du projet développé par sa filiale. Elle ne dispose pas d’actif immobilisé. Le logiciel est développé par la filiale qui exploite le site internet le supportant.

La bonne pratique F.initiatives

Pour bien justifier une déclaration de CIR-CII, le suivi temps des personnes impliquées sur le projet est un incontournable. Dans le cas des groupes de sociétés, le suivi doit bien identifier l’appartenance. En cas de sous-traitance, avec ou sans lien de dépendance, veillez à bien disposer d’un agrément.